Des insectes dans votre thé aux fractures métalliques, la microscopie dévoile ce que l’œil humain ne peut voir
Par Carl Leblanc, chimiste, M. Sc., métallurgiste
Pour les experts en matériaux et en chimie, le microscope constitue un outil incontournable. Cet instrument lui permet, entre autres, de comprendre les mécanismes de défaillance, les caractéristiques des matériaux, l’origine de la contamination, ainsi que la nature et le mode de rupture des pièces. En effet, le microscope est généralement le premier instrument utilisé par l’expert pour poser un diagnostic et comprendre le mode de défaillance.
Différents types de microscopes peuvent être utilisés, allant du microscope binoculaire, qui permet une observation en trois dimensions, au microscope électronique, lequel utilise un faisceau d’électrons au lieu de la lumière. Ce dernier offre un grossissement important ainsi qu’une capacité d’analyse élémentaire, ce qui permet d’identifier les éléments chimiques présents dans les échantillons examinés.
Que peut-on observer à l’aide d’un microscope optique sur des produits du quotidien? Prenons, par exemple, ce que l’on peut retrouver dans du thé (figure 1) ou dans le beurre d’arachide (figure 2). L’observation au microscope permet d’observer des structures invisibles à l’œil nu. Le thé présente des quantités considérables de parties d’insectes, alors que le beurre d’arachide contient une concentration appréciable de particules inorganiques (particules de terre et/ou de sable) résultant de la transformation du produit.
Figure 1 – Observation microscopique de thé vert.
Les structures dont la morphologie est tubulaire (flèches) sont des parties d’insectes (setae) présentes lors de la transformation du thé.
Figure 2 – Observation microscopique de beurre d’arachide.
Les cristaux blancs visibles un peu partout sur l’image sont des particules de terre ou de sable.
Fracture d’une pièce
Figure 3 – Microscope électronique à balayage (MEB)
L’observation d’une fracture au microscope binoculaire, à faible grossissement, permet d’analyser le mode de rupture et de déterminer si le bris est soudain ou progressif.
En complément, le microscope électronique à balayage (MEB) fournit un grossissement plus élevé et des détails plus précis sur la nature de la rupture ainsi que sur la présence de défauts de fabrication (Figure 3). Couplé à un détecteur de spectroscopie à dispersion d’énergie (EDS), il permet également d’identifier la présence d’éléments corrosifs, comme le chlore, élément qui peut avoir contribué à la défaillance de la pièce.
Contamination par la suie
La présence de dépôts noirs sur les surfaces intérieures d’un bâtiment peut révéler une contamination par la suie. Grâce à une méthode de prélèvement appropriée, un microscope optique permet de confirmer la présence de suie et d’analyser sa morphologie afin d’en déterminer l’origine. Il est ainsi possible d’identifier si la suie provient d’un voisin, d’un incendie externe (comme un feu d’herbe ou un incendie de forêt), ou de l’usage excessif de chandelles de mauvaise qualité. Ce type d’analyse est particulièrement utile aux experts en sinistres pour délimiter précisément les zones contaminées à la suite d’un incendie.
Infiltration d’eau lors du transport de marchandises
Dans une économie mondialisée, les infiltrations d’eau peuvent causer d’importants dommages matériels. Le microscope électronique à balayage, couplé à un détecteur EDS, permet d’analyser les dommages par l’eau et d’établir son origine. Par exemple, en analysant des échantillons de surface contaminés par l’eau il serait possible de déterminer si les dommages sont survenus en mer ou durant le transport ferroviaire.
Contamination d’une pièce ou d’un produit
L’analyse chimique d’un contaminant peut être effectuée à l’aide d’un microscope utilisant la lumière infrarouge, plutôt que la lumière visible. Cette technique permet d’identifier les composés chimiques présents dans une contamination et ainsi d’en déterminer l’origine. Elle est notamment utile dans les cas de rupture de conduites de protection incendie en CPVC, causées par la présence d’un contaminant interne ou externe, par le contact d’un scellant incompatible ou encore par le contact avec un câble électrique.
Dommages sur un véhicule
La combinaison du microscope infrarouge et du microscope électronique permet de déterminer si un dommage observé sur un véhicule résulte d’un contact avec un autre véhicule (grâce à l’analyse de transfert de peinture) ou avec une structure fixe, comme un bâtiment. Ce type d’expertise permet aussi de vérifier si l’impact résulte d’une tentative de fraude ou d’un véritable accident.
Verre et unités de verre scellé
Enfin, l’utilisation conjointe d’un microscope à lumière polarisée, d’un microscope infrarouge et d’un microscope électronique permet d’identifier ou de confirmer la cause d’un bris de verre, que ce soit pour les fenêtres d’un bâtiment ou alors un aquarium. Ces techniques permettent aussi de comprendre l’origine d’une buée chimique à l’intérieur d’une unité de verre scellé, ou encore la dégradation du revêtement énergétique interne. De plus, il est possible de déterminer l’origine exacte des rayures sur les panneaux de verre en analysant les dépôts microscopiques présents dans les égratignures en question.
Conclusion
Les différentes techniques de microscopie et leur combinaison constituent des outils puissants au service de l’expert, lui permettant d’établir l’origine et la cause précise des dommages observés.
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